Courte déception
Aujourd’hui je me suis déçu moi même ce qui ne m’arrive pas souvent. Je suis un gars très esthétique, plutôt doué pour ce qui est du sexe, d’une intelligence très supérieure à la normale ce qui n’est pas difficile quand on constate la débilité ambiante, et d’une modestie totalement inexistante.
Je me déçois donc rarement.
Mais là, je dois avouer que je fus pris de court.
Je m’explique.
J’avais fixé rendez-vous à Viviane dans un parc. J’aime bien Viviane. Elle a de jolies formes, une perversité de bon aloi, un mari amical et rigolo.
Je comptais l’inviter à boire un thé pour elle, un café pour moi. Je n’ai jamais bien compris comment les femmes peuvent aimer cette lavasse saumâtre mais bon, chacun fait ce qu’il veut avec ses breuvages, ça ne me regarde pas. Je n’ai rien contre le thé tant que je n’en bois pas.
J’attendais Viviane tout en me disant qu’on ferait nos aventures scabreuses un autre jour car, pour l’heure, j’avais un rendez-vous incontournable dans tous les sens du terme.
J’étais donc tranquille, sûr de moi.
J’envisageais quand même un fantasme ou deux dans le bar juste pour le plaisir car je ne suis pas de bois.
Rien de plus.
Un saint quoi !
Mais je ne suis pas un saint, Dieu m’en garde.
Je me suis fait avoir à la surprise.
Plutôt que d’arriver sur mon flanc droit ou gauche ce qui m’aurait permis de ne la découvrir qu’à la dernière seconde, la garce avait prévu une attaque de front, juste dans l’axe de mon regard. Elle déboula soudain à vingt mètres, sortant, superbe apparition, de l’ombre des platanes, couverte ou plutôt découverte malgré le froid, d’une robe noire totalement inexistante au niveau des épaules, totalement transparente sur toute la longueur des jambes. Elle marchait d’un pas souple, faisant élégamment voleter ce jupon qui ne cachait rien.
J’en restai sans voix, le cerveau vide, les mains moites.
Ce qui s’est passé après, je ne vous le raconterai pas. Qu’est-ce que vous croyez bande de matois et de matoises ? Je ne suis pas de ce pain dont on fait les miches et je sais garder mes secrets de sexualité.
Disons simplement que je fus faible, que mes valeurs morales s’en trouvèrent un tantinet bousculées, que je n’ai pas suivi, cette fois encore, mon principe de savoir garder mon calme en toutes circonstances.
D’où légère déception comme annoncée au début de cet écrit.
D’où compensations largement compensatoires à cette légère déception.
D’où problème…
Mon rendez-vous de ce jour, Julie, devrait arriver dans une seconde une seconde et demie car elle est toujours à l’heure. C’est là son moindre défaut en l’occurrence, car je me trouve à cet instant nu sur mon lit de satin, une Viviane tout aussi nue dormant du sommeil de la juste à mes côtés.
Puis-je inventer en une seconde, une seconde et demie, une excuse valable ?
Non.
Je n’essaierai d’ailleurs même pas.
Car heureusement, Julie qui me connait bien ne me prend pas pour un saint, Dieu l’en garde.
Et comme nous savons nous adapter à toutes les situations, même les plus vicieuses… surtout les plus vicieuses, je pense que nous pourrons nous complaire dans ce petit triolet aimable et passer une merveilleuse journée.
Comme quoi, les déceptions peuvent mener à tout…
Même au meilleur.
En coup de vent
…
Dessin 546
La femme assise
Voisinage
Je m’amuse tranquillement à aligner des mots sur mon ordinateur pour mon prochain bouquin lorsque, insidieusement, mon cerveau commence à reprendre pied dans la réalité.
Une intuition.
Une crainte… légère mais insistante.
Qu’est-ce qui se passe ? Me dis-je avec circonspection.
La réponse m’arrive, brutale, fascinante telle un crotale me fixant de ses yeux fendus.
C’est calme.
C’est trop calme.
Nous sommes jeudi.
Le jeudi c’est le jour de Suzie ma rousse hyper agitée. La semaine dernière elle m’a cassée trois verres en cristal, deux théières en porcelaine de Tolède, un vase Ming de 300 ans d’âge, puis elle m’a emmené faire les magasins pour plus d’un milliers d’Euros, suivi d’un goûter chez Maxim’s, confirmé d’un diner au Savoy et d’une soirée au Club du Marta d’où elle est revenue à peine éméchée mais ayant perdu tous ses vêtements sans savoir ni où ni comment.
C’est ça Suzie.
Je ne vous parle pas de ce qui a suivi par soucis des bonnes mœurs et pour ne pas me valoriser plus que nécessaire mais ce fut chaud bouillant et assez jouissif je dois l’avouer.
Je ne m’en plains pas. Elle met de l’ambiance dans ma vie de célibataire par ailleurs assez tranquille. Ceci étant, heureusement que ce n’est qu’une journée par semaine.
Bon.
Je regarde ma montre.
Nous somme jeudi, il est quinze heures, et pas un bruit.
Inquiétant, mais ne paniquons pas tout de suite.
Vérifier d’abord.
Je me lève, commence à explorer mon vaste appartement dominant la seine du fond de ses trois cents quinze mètres carrés. Personne dans les huit chambres d’amis, personne dans les deux salons, personne dans la salle de séjour, personne dans la cuisine ni dans les deux salles de bains. Où peut-elle être ?
Je monte sur la terrasse végétalisée. Vide.
D’accord, il faut que je me rende à l’évidence Suzie n’est plus chez moi, c’est encore mon vicieux de voisin qui me l’aura piquée. Je l’appelle séance tenante.
– Salut Norbert. Dis-donc, que tu m’empruntes mes affaires passe encore mais tu pourrais au moins me prévenir.
– Mais je t’ai prévenu mon vieux, je t’ai envoyé un SMS lorsque Suzie a déboulé chez moi et Constance est dans ta chambre.
Je vérifie mon portable, c’est vrai, au temps pour moi.
– Ah OK, désolé je n’avais pas regardé mes messages, on se fait une bouffe un de ces soirs ?
– Pas de problème, vendredi de la semaine prochaine, ça t’irait ?
– Ça marche. A vendredi.
Il raccroche, moi aussi. Je vérifie ma chambre, la seule que je n’avais pas vérifiée. Constance, la femme de Norbert, m’y attend selon la loi bien simple des vases communicants. Je n’y perds pas, elle est aussi rousse que Suzie et si ses fantasmes sont moins tumultueux, ils n’en sont pas moins exaltants.
Elle n’est vêtue ou plutôt dévêtue que d’une nuisette bleue chic, sexy et, ma foi, très aguichante.
Une belle soirée en perspective.
Comme je le dis toujours il est particulièrement important d’avoir des rapports de bon voisinage.
Au propre comme au figuré.










