Je m’amuse tranquillement à aligner des mots sur mon ordinateur pour mon prochain bouquin lorsque, insidieusement, mon cerveau commence à reprendre pied dans la réalité.
Une intuition.
Une crainte… légère mais insistante.
Qu’est-ce qui se passe ? Me dis-je avec circonspection.
La réponse m’arrive, brutale, fascinante telle un crotale me fixant de ses yeux fendus.
C’est calme.
C’est trop calme.
Nous sommes jeudi.
Le jeudi c’est le jour de Suzie ma rousse hyper agitée. La semaine dernière elle m’a cassée trois verres en cristal, deux théières en porcelaine de Tolède, un vase Ming de 300 ans d’âge, puis elle m’a emmené faire les magasins pour plus d’un milliers d’Euros, suivi d’un goûter chez Maxim’s, confirmé d’un diner au Savoy et d’une soirée au Club du Marta d’où elle est revenue à peine éméchée mais ayant perdu tous ses vêtements sans savoir ni où ni comment.
C’est ça Suzie.
Je ne vous parle pas de ce qui a suivi par soucis des bonnes mœurs et pour ne pas me valoriser plus que nécessaire mais ce fut chaud bouillant et assez jouissif je dois l’avouer.
Je ne m’en plains pas. Elle met de l’ambiance dans ma vie de célibataire par ailleurs assez tranquille. Ceci étant, heureusement que ce n’est qu’une journée par semaine.
Bon.
Je regarde ma montre.
Nous somme jeudi, il est quinze heures, et pas un bruit.
Inquiétant, mais ne paniquons pas tout de suite.
Vérifier d’abord.
Je me lève, commence à explorer mon vaste appartement dominant la seine du fond de ses trois cents quinze mètres carrés. Personne dans les huit chambres d’amis, personne dans les deux salons, personne dans la salle de séjour, personne dans la cuisine ni dans les deux salles de bains. Où peut-elle être ?
Je monte sur la terrasse végétalisée. Vide.
D’accord, il faut que je me rende à l’évidence Suzie n’est plus chez moi, c’est encore mon vicieux de voisin qui me l’aura piquée. Je l’appelle séance tenante.
– Salut Norbert. Dis-donc, que tu m’empruntes mes affaires passe encore mais tu pourrais au moins me prévenir.
– Mais je t’ai prévenu mon vieux, je t’ai envoyé un SMS lorsque Suzie a déboulé chez moi et Constance est dans ta chambre.
Je vérifie mon portable, c’est vrai, au temps pour moi.
– Ah OK, désolé je n’avais pas regardé mes messages, on se fait une bouffe un de ces soirs ?
– Pas de problème, vendredi de la semaine prochaine, ça t’irait ?
– Ça marche. A vendredi.
Il raccroche, moi aussi. Je vérifie ma chambre, la seule que je n’avais pas vérifiée. Constance, la femme de Norbert, m’y attend selon la loi bien simple des vases communicants. Je n’y perds pas, elle est aussi rousse que Suzie et si ses fantasmes sont moins tumultueux, ils n’en sont pas moins exaltants.
Elle n’est vêtue ou plutôt dévêtue que d’une nuisette bleue chic, sexy et, ma foi, très aguichante.
Une belle soirée en perspective.
Comme je le dis toujours il est particulièrement important d’avoir des rapports de bon voisinage.
Au propre comme au figuré.
Un peu de calme…
Les français, ça se plaint toujours !
Dessin 545
Salon du Blanc en approche…
Lire et écrire
– Tu écris ?
– Oui.
– Des romans ?
– Entre autres.
– Ça paye ?
– Euh, comme-ci comme ça.
– Combien ?
Il faut l’avouer, Suzie est superbe, intelligente, voluptueuse. Au lit c’est une tuerie, mais je me demande si elle n’est pas un rien mercantile.
– Eh bien mon dernier roman « La Castafiore a les yeux verts » s’est vendu à 100 000 exemplaires… ce qui nous fait…à dix pour cent de droits sur un prix de vente de quinze euros l’exemplaire… voyons…
– Cent-cinquante mille euros.
Quand je vous dis que dès qu’il s’agit d’argent Suzie sait compter.
Elle repose mon roman « Catastrophe à Cagliostro » qu’elle parcourait des yeux, allongée sur le lit, totalement nue à l’exception d’un morceau de couverture légèrement posé sur le bas de ses fesses. Rien de tel pour que j’ai les yeux en billes de loto, le front en sueur et le cerveau façon jelly anglaise rose et gélatineuse.
Et pourtant, j’en aurais bien besoin de mon cerveau pour trouver une sortie de secours avant l’explosion imminente.
– Tu vas m’apprendre.
Baoum !
Encore ?
Mais qu’est-ce que c’est que toutes ces femmes qui veulent absolument que je leur apprenne des choses qui n’ont rien à voir avec mes sujets préférés. Déjà Clémentine et son billard (voir un autre article déjà publié), et maintenant Suzie et l’écriture. J’aime écrire d’accord mais je ne veux pas apprendre à qui que ce soit à le faire surtout pas à une femme sensuelle et érotique comme Suzie. A la fin j’aurais l’impression de faire l’amour à un roman de Balzac ou de Zola. Et on sait combien ces deux écrivains sont peu portés sur la chose. En tout cas dans leurs écrits.
Encore ce serait Victor Hugo. Mais écrire comme le père Hugo, c’est vouloir attraper la lune.
– Pourquoi veux-tu apprendre à écrire ?
– Pour gagner plein d’argent.
Question idiote. Jelly je vous dis.
– Mais tu en gagnes déjà plein.
Suzie, dans les moments où elle n’est pas chez moi, c’est à dire quatre-vingt pour cent du temps, pose pour des magazines et défile plus ou moins habillée dans des soirées plus ou moins privées. Ça paye beaucoup mieux qu’un roman à quatre sous.
Elle me fixe d’un regard doux en se mordant la lèvre. Ce n’est plus de la Jelly, c’est de la mayonnaise.
– Je veux écrire.
– C’est long, ardu, difficile et très ingrat. Il faut des mois pour pondre un bouquin et parfois il ne marche pas.
Ouf, je sens que j’ai marqué un point à voir son mordillement de lèvre qui s’intensifie.
Après un silence assez long elle me lâche.
– Ah !
Je n’aime pas ce « Ah ». Croyez-en ma longue expérience, c’est un « Ah » qui sent le moisi.
– Je sais. Tu vas m’écrire un roman, nous le publierons sous nos deux noms et nous partagerons.
– Euh…
– Ou, mieux encore, écris ma biographie. Ça se vend bien les biographies, non ?
– Euh oui.
– Eh bien voilà !
Voilà quoi ?
Mais je n’ai pas le temps d’en dire plus. Sur ces mots fatidiques elle a bondit, s’est habillée, maquillée en quatrième vitesse, m’a mis un baiser sur le nez, avant de disparaître dans une porte claquée. Un rendez-vous pour un casting où elle serait en retard mais bon, on l’attend toujours.
Tu m’étonnes.
J’ai donc un dilemme.
Soit j’écris la biographie d’une femme de vingt-huit ans et trois quart ce qui risque de faire un volume assez court. Sulfureux mais court. Et puis partager des droits d’auteur avec Suzie, je crains que ce ne soit pas très équitable, un cerveau en Jelly n’étant pas le meilleur outil pour les négocier.
Soit je trouve une raison valable de ne pas le faire, je me trouve plein d’obligations qui m’empêche de la voir, et je trouve une autre femme du jeudi. En même temps si je fais ça, je la connais, elle va me défoncer ma porte, me ruiner mon intérieur et m’arracher les yeux.
Argh !
Je sais.
C’est tout simple finalement. Je vais faire comme à l’habitude avec mes éditeurs quand ils me font une commande. Je vais lui dire que j’écris sa biographie, je vais m’y mettre avec l’ardeur que je me connais, dix ans après on y sera toujours et elle m’aura quitté.
D’ailleurs je commence tout de suite.
Voyons…
Suzie est une femme superbe qui a un joli visage et de gros seins.
Bon début !
Poésie étoilée
Ça commence à sentir Halloween, non ?
Dessin 151
Une semaine en i
Je me suis fait la réflexion la semaine dernière que le mois d’octobre est un mois souvent froid et, de plus, que c’est un mois où l’on n’est pas encore habitué à ces températures frisquettes. Pas de problème, que je me suis dit, je vais me prévoir une jolie bouillotte pour chaque jour de la semaine histoire de pouvoir me réchauffer facilement, prendre du plaisir, et bien dormir.
Bonne idée.
Et comme je suis un homme littéraire (Mais si !), j’ai décidé d’en faire un mois en ie pour la rime avec les jours de la semaine en i, et pour le petit challenge supplémentaire.
Aussitôt dit, aussitôt fait.
Je suis comme ça, pragmatique et efficace.
Le lundi, je suis avec Julie, une superbe blonde aux grands yeux bleus et aux seins magnifiques.
Le mardi, c’est Sophie, une petite brune gentille très douée pour les massages voluptueux.
Le mercredi, voici Émilie, une charmante femme aux tailleurs et cheveux courts très secrétaire de direction avec les fantasmes assortis évidemment.
Le jeudi, je me lâche avec Suzie, une rousse flamboyante, rondeurs chaleureuses, tatouages partout, orgasmes à la folie.
Le vendredi, je prends mes RTT d’écriture en compagnie de Vickie, cheveux longs très noirs et pupilles profondes très sombres.
Le samedi, le weekend s’annonce, il faut de l’exotisme, je voyage avec Mélie, une métisse sulfureuse et chatoyante.
Et le dimanche.
Ah le dimanche.
Eh bien j’ai conservé Clarisse dont je ne peux décidément plus me passer. J’ai organisé un bouquet de dimanches somptueux à lui faire faire n’importe quoi ce qu’elle fait particulièrement bien.
Une fois mon petit programme posé, j’étais, je dois l’avouer, assez fier de moi. Un automne qui s’annonçait particulièrement confortable.
Et puis, aujourd’hui, j’ai rencontré Mélanie.
Mélanie a une peau de lait, des yeux noisette à tomber, une bouche pulpeuse à croquer.
Aïe !
Ma semaine est pleine, où vais-je placer Mélanie ?
Je ne peux quand même pas remettre en cause un programme si parfait, et quand à faire attendre Mélanie, ce n’est pas du tout le style de la donzelle.
Pour l’instant, Mélanie est allongée sur mon lit dans une tenue lycra bleu-vert, bas, porte jarretelles, collier de perles et sourire à tomber.
Tout ce que j’aime.
Hum… On va toujours prendre ce qu’on a et on se posera des questions après.
On sonne à la porte.
Je regarde mon calendrier, voyons c’est le jour de…
Au secours !










